Quand je serai grand, je ferai l’EFAB

Je me souviens quand j’étais jeune (enfin, encore plus que maintenant je veux dire), un jour, il a fallu choisir un métier. Jusqu’alors, j’avais choisi des études. C’est très précisémment alors que je décérébrais une grenouille, en plein partiel de deuxième année de Deug option biochimie, que la lumière m’est apparue : "mon petit bonhomme, il faut regarder la vérité en face, tu ne veux pas, ne peux pas, n’envisages même pas passer toute ta vie devant une paillasse jonchée d’éprouvettes et d’animaux en tout genre sacrifiés avec un pieu planté entre les deux yeux". L’heure était grave, j’ai opté pour les grands moyens : le soir même, je sortis la plus belle feuille blanche de tout l’ouest et classai en deux colonnes mes envies dans un format révolutionnaire : j’aime/j’aime pas.

Dans la catégorie "j’aime", sont apparus en tête de liste : écrire, rencontrer des gens, lire la presse, découvrir des nouveaux sujets, rencontrer des gens qui s’engagent donc que j’admire, lire des livres, les médias en général. En creusant un peu, je me suis rendu compte que lire les journaux le matin correspondait à un cérémonial bien particulier que je partageais avec peu de personnes de mon entourage de l’époque. J’arrivais à la fac dès l’ouverture de la bibliothèque pour truster les quotidiens disponibles : le Figaro, Libération, Le Monde, La Tribune, l’Humanité, France Soir, l’International Herald Tribune, La Croix et, 1 fois par semaine, les news mag Le Point, Le Nouvel Obs, L’express et l’événement du jeudi. J’attachais une importance toute particulière aux éditorialistes et leurs billets d’humeur, m’amusais à mesurer et comparer le traitement des journaux par type d’actualité, comme d’autres le font aujourd’hui bien mieux que moi à l’époque. Je suivais le parcours des journalistes, l’évolution de leur pensée, leur ton, j’y trouvais mes mentors.

Il en sortit une certitude : je voulais cotoyer cet environnement au plus vite, au plus près, sans pour autant devenir moi-même journaliste, je les admirais trop pour vouloir m’y mesurer. Après enquête, j’ai identifié un métier et l’école qui me plongerait immédiatement dans cet univers professionnel. En deux ans d’EFAP Communication (Ecole Française des attachés de presse), de cours -par des professionnels- en stages -au sein d’entreprises-, j’ai à de multiples occasions pu conforter mon choix.

En regardant de plus près l’évolution de l’environnement de ces 15 dernières années, si j’avais 20 ans aujourd’hui, mes goûts me pousseraient probablement vers un métier qui reste à inventer : attaché de blog. Ceux que j’admire, qui s’engagent en toute liberté selon leurs propres opinions, dont j’attends les papiers avec impatience, qui me font rire, me révoltent, m’enthousiasment, en menant parfois un travail d’enquête impressionnant, en générant des débats visibles, impliquants et enrichissants, sont plus souvent des blogueurs que des journalistes. Quelques-unes des personnes qui comptent pour moi professionnellement sont dans ma blogroll ou mon lecteur RSS tandis que mes éditorialistes préférés d’antan tournent aujourd’hui souvent en boucle notamment sur des chaines d’information cablées.

C’est probablement l’Ecole Française des Attachés de Blog que j’intégrerais si elle existait.

MAJ (6/10/2005) : devant l’avalanche d’emails (2 dont 1 de ma famille), je suis prêt à révéler le contenu de la colonne "j’aime pas" de l’époque… 1. Décérébrer des grenouilles 2. Parler à une éprouvette 3. Les partiels à la fac. OK, je ferais pas forcément la même aujourd’hui !

Sarkozy m’a spammé

Bien sûr, je ne suis pas le seul, il paraît qu’on est 300.000 dans ce cas là, tout ça parce qu’on est inscrits au programme de fidélité Maximiles (dont la dimension politique m’avait échappé à l’époque). L’idée de l’e-mailing politique nous viendrait tout droit des US et du parti républicain qui y sévit (super…) et on apprend dans Libération que les internautes ont été sélectionnés selon des critères qui les rendraient "à priori réceptifs à la prose sarkozienne" (ça y est, je manque d’humour là). J’ai un scoop pour M. Sarkozy et ses équipes : ouvrir un email n’a jamais constitué un signal positif et ne permet en rien de mesurer un succès, ça peut même déclencher l’effet exactement inverse : d’ailleurs, il semble que je ne sois pas le seul à me sentir agressé puisque certains sont allés jusqu’à déposer plainte auprès de la Cnil. Et si on offrait un vrai rejet massif à M. Sarkozy ?

J’aime les gens

Il est des moments où la blogosphère se charge de rappeler qu’elle n’est finalement que le reflet de la vraie vie, même dans ses plus mauvais côtés. Elle ne trouve pas mieux la limite entre le débat et l’irrespect. Pire, elle utilise parfois la polémique pour attirer l’attention, l’insulte en guise de marketing. Tiens, par exemple, les blogs francophones ont été agités depuis 2 jours par un message énervé suite à une attaque, provoquant une avalanche de commentaires sur le blog, sur d’autres blogs, un nouveau message et son lot de commentaires, et encore un autre un peu dépité… Le défi du jour était de ne pas croiser le chemin de ces guerres intestines, j’ai échoué, ce qui explique le présent message. 

Les exemples sont multiples, en France et ailleurs, et celui du jour n’est par pire qu’un autre. Je me souviens avoir réagi une fois en osant un commentaire à la suite d’un message qui m’avait d’autant plus agacé qu’il était issu d’un blog que j’aime bien. Je l’ai regretté aussitôt, trouvant le débat stérile, et me suis promis de ne plus jamais participer à ça. Comme dans la vraie vie, on peut être déçu par des gens qu’on aime bien à priori et qui finissent par tomber dans un manque d’élégance souvant autant désespéré que désespérant. Il pourrait même arriver qu’on se déçoivent soi-même à devenir le spectateur indécent de débats sans idée. Je respecte ceux qui y participent sur les blogs mais j’ai fait mon choix : si je n’aime pas un blog, je ne le lis pas, si un message sur un blog que j’apprécie me déçoit, je l’ignore et passe au message suivant. Et surtout, j’ai décidé que l’audience de ce blog (que je n’ai plus consultée depuis le lancement de cette version) n’avait aucune espèce d’importance (elle est probablement proche de l’inexistant d’ailleurs). Il ne continue à m’intéresser que pour deux raisons : utiliser le plus pratique des bloc-notes que j’ai trouvé (c’est l’idée d’origine, non ?) et initier de nouvelles rencontres en partant à la découverte de personnes que je n’aurais sans doute jamais rencontré dans la vraie vie.

Même si c’est ringard, dépassé, totalement hors de propos et même si ça ressemble à des oeillères, j’aime les gens et suis bien décidé à continuer, tant pis si la blogosphère ouvre malgré moi une fenêtre sur un monde qui n’est pas toujours celui qui m’intéresse. Et puis il n’est jamais totalement impossible que ça finisse avec un zeste d’humour par prendre les quelques pas de recul nécessaires…

RV raté

Encore en train de rater la réunion Paris Carnet notée en super gros dans mon Palm qui me hurle aux oreilles depuis 1 h00 que je suis en train de planter un "rendez-vous". JE SAIS !!! Paske y a foot à la télé ? Que nenni… J’aurais donc retrouvé le chemin de la salle de sport ? Euh non, non plus…

Trop de taf, pas le temps, attendu à la maison, moi dégouté, c’est le troisième mois consécutif que je manque l’occasion de relier leurs blogs avec des gens RDLVV (la traduction est quelque part chez  Laurent). Je vais encore me taper un trajet de nuit en vélo, pour me venger, j’envoie une photo de Paris la nuit super nulle sur mon moblog dès ce soir. C’est violent, je sais, mais c’est à la hauteur de mon désespoir. Bon, le mois prochain, c’est sûr…

Mon Blog Day à moi

Véritable aventurier des temps moderne, j’ose me révolter contre la blogosphère en lançant mon BlogDay à moi tout seul, après celui qui a connu son petit succès le 31 août dernier (rapport à « 31/08 » qu’on dirait que c’est écrit « Blog » enfin quand on a quand même un sérieux problème rétinien). C’est une démarche un poil personnelle que je lance en ce 5 septembre, même si 0509 ça ressemble à rien d’autre que… 0509. Bon, Nir Ofir, l’inventeur de la chose originelle, il aurait certainement trouvé une analogie percutante, décalée, inattendue, désopilante voire émouvante mais là j’ai pas trop son numéro sous la main alors je fais avec les moyens du bord.

Ce laborieux préambule juste pour signaler que depuis quelque temps, je dévore lit dès publication grâce à mon lecteur RSS quitte à laisser tomber tout le reste assez régulièrement et toujours en dehors des heures de bureau les divagations textes de Vinvin, jeune homme complètement marbré bien sous tout rapport qui cumule les avantages de bénéficier d’un lectorat déjà conséquent, d’avoir créé son blog depuis très longtemps, de n’avoir absolument pas besoin de moi pour afficher des audiences records et de faire des phrases courtes qu’on a envie de lire jusqu’au bout quand c’est lui qui les écrit -euh, je sais même pas pourquoi je dis ça… A mon avis, il fume des trucs, avec un talent pareil, ce garçon est en train de passer à côté d’une grande carrière de comique et il mériterait une médaille pour « service rendu à mon entourage proche » qui a vu l’état de mon humeur nettement s’améliorer depuis que j’ai découvert son blog, je sais même plus comment.

C’est bon de se révolter parfois, c’est ça aussi les blogs…

Note de bas de page : si j’ai réussi à convaincre une seule personne d’aller découvrir ce blog (par exemple un pauvre malheureux arrivé ici par hasard et prêt à cliquer sur le premier lien venu pour sortir de cet enfer), je lui conseille la mention légale Obligatoire qui a conduit à la dépression la quasi totalité des postiers finlandais assez peu habitués à une telle densité de lettres d’insultes en dehors du mois de décembre.

La joie des services clientèles téléphoniques

Je viens de passer presque 2h00 confronté à la vraie vie, pas le monde virtuel des blogs, non, non, juste celui des services clientèles, ce merveilleux univers des call centers. J’avais une demande certes pas facile : associer mon abonnement Canal + à l’un des deux bouquets Noos dont je dispose pour avoir toutes les chaînes sur une même carte. Ca fait plusieurs mois que je devais le faire mais je reculais l’échéance, bêtement inquiet à l’idée que ça ne prenne plus que les 10 minutes qui auraient du être nécessaires.

Après avoir tenté en vain de trouver une voie d’accès simplifiée en gérant la demande sur les sites des deux fournisseurs concernés, je me décide à appeler Noos : le premier numéro indiqué sur le site est hors service, pas de problème, je passe par l’annuaire pour accéder au répondeur Noos. Bonne nouvelle, le message d’accueil est très clair : la plupart des questions peuvent être réglées très vite. Cool, je me laisse guider…

"Pour une question commerciale ou administrative, tapez 1, pour une assistance technique, tapez 2" Ok, je tape 2, ça s’annonce bien

"Modifier la facture, taper 1, changer l’abonnement, 2, autre demande, 3" Bon je réfléchis 1 seconde (on est samedi, le cerveau est en service minimum), non je ne change pas l’abonnement, je tape 3

"Vous déménagez tapez 1, résilier votre contrat, 2, autre demande, 3" J’aurais peut-être du taper 2 plus haut, bon je me démonte pas et je tape 3…

La charmante voix mi-humaine mi-synthétique m’annonce joyeusement que je vais être mis en relation avec le service concerné. Après quelques 20 minutes de musique type supermarché, sans aucune indication sur la durée d’attente prévisible, la musique s’interrompt brusquement. Yes ! Une dame me déroule sur une voix monocorde ses prénom, nom, fonction et me décoche un "bienvenue chez Noos que puis-je faire à votre service" aussi sincère que mon ton calme et détendu pour lui expliquer ma demande. Je passe par les méandres habituels de numéros abonnés, nom, adresse, réexplique ma demande, j’entends la dame taper nerveusement sur son ordinateur, hésiter puis me répondre "il va falloir appeler Canal Plus pour ça, je vous donne les 3 numéros de téléphone que vous pouvez appeler". Pourquoi 3 numéros (tous très différents) ? L’histoire ne le dira jamais.

J’appelle un des 3 numéros au hasard, on me demande d’entrer mon numéro abonné, je ne l’ai pas sous la main, pas de problème, la jolie voix "synthéthumaine" (tiens on dirait la même d’ailleurs) me rappelle que je peux le trouver sur mon magazine abonné. Je cours nerveusement à la recherche d’un de ces machins que j’ouvre jamais, par miracle, j’en trouve un, choisis parmi les 3 séries de numéros indiquées celle qui me parait sympa (comment je sais lequel est mon numéro abonné moi ??) et, miracle, je rentre directement dans le système Canal : je crois qu’on peut dire que j’ai la baraka moi aujourd’hui… Là c’est à nouveau le long couloir de choix multiples. Il propose toujours pas "Passer votre abonnement Canal d’une carte Noos à une autre", je suis dans la catégorie "autre demande", définitivement. La musique d’ascenseur cette fois, seulement 10 minutes d’attente, j’arrive dans un premier service qui me redirige avant de m’avoir bien fait comprendre au ton de sa voix que je l’avais dérangée inutilement. Je profite de la troisième série musicale pour m’enfiler un petit Lexomil et une dame tout à fait charmante décroche pour prendre mon problème à bras le corps malgré ma demande déroulée d’une voix monocorde, avec un agacement à peine audible grâce aux premiers effets du myorelaxant. Elle s’execute, me prévient qu’il est préférable de laisser le décodeur allumé sur une chaîne de Canal le temps que ça soit pris en compte, ce qui peut être très long (sans doute la nuit entière). Je sens bien que ça peut ne pas marcher, qu’il est possible que je sois obligé de rappeler, mais je n’ai même plus le courage de lui poser la question et de prendre son numéro d’accès direct au cas où. De toute façon, j’ai même pas prévu de regarder la télé ce week-end. Ce serait juste bien que ce soit rétabli pour la diffusion de Desperate Housewives jeudi prochain.

J’ai l’impression d’avoir vécu un grand moment de solitude que beaucoup ont déjà vécu avec un service clientèle ou un autre. OK, j’avais promis de plus jamais me plaindre sur mon blog mais là je me plains pas, je constate.

23h au bureau – le téléphone ne sonne plus

Grosse journée, longue semaine, y a des fois où on fait pas un métier facile… Bon c’est la première fois que je me plains sur mon blog, c’est aussi la dernière, promis. Tiens, tant que j’y pense, quelqu’un pourrait me rappeler où est le Club med Gym le plus proche ??

7h55 au bureau – le téléphone sonne

– "Allo, bonjour"

– "Bonjour monsieur, je suis journaliste pigiste, on m’a dit que vous aviez organisé une conférence sur les blogs cette semaine et qu’il y avait le français Laurent Le Meur"

– "Absolument, mardi dernier, sur les blogs, le RSS, le podcasting et un tour d’horizon d’autres nouveaux médias émergeants, et Loïc Le Meur est en effet intervenu"

– "Bon ben ça m’intéresse, surtout le blogcasting… Je voulais savoir si vous pouviez m’envoyer le dossier de presse"

– (amusé) "Je peux vous faire passer la présentation mais je vous invite plutôt à assister à l’une des nombreuses conférences à venir à la rentrée, vous pourrez y rencontrer les principaux acteurs des blogs et du podcasting, comprendre mieux le périmètre et les enjeux de ce nouvel environnement média"

– "Ah, mais comment je fais pour les trouver ?"

– "Vous les trouverez facilement via un moteur de recherche par exemple"

– "Oh vous savez, moi, les moteurs de recherche, internet, c’est pas trop mon truc"

– (agacé) "D’accord, je peux vous envoyer une liste mais pour plus de détails, il faudra passer par le net"

– (limite aimable) "Bon ben d’accord envoyez moi la liste mais surtout le dossier de presse et mettez bien les visuels et les prix, je dis ça parce qu’on voit encore trop souvent des dossiers mal faits et incomplets"

– "Bien sûr, avec les prix…, vous pouvez me rappeler votre adresse email ?"

– "Je préfère par courrier, j’ai pas trop accès aux mails là…"

J’ai bien fait d’arriver tôt au bureau, ça aurait été dommage de rater ça, non ? Sinon, je me dit que globalement, c’est pas gagné…

Le challenge de la liberté d’expression

Il est d’usage de considérer les blogs d’opinion ou d’experts comme des espaces de libre parole dont la seule limite est fixée par la confidentialité "légale" ou "contractuelle" des informations relayées. Certes, mais j’y ajouterais une limite dont les contours sont bien moins simples à définir et reposent sur le bon sens, le tact, la diplomatie avec les contraintes d’un réseau professionnel à préserver. Autant de critères subjectifs, politiquement corrects, souvent ennemis du débat d’opinion. Libre à chacun de placer le curseur là où il le souhaite. De plus, et c’est sans doute un point clé de la différence que je fais entre un blogueur et un journaliste : quelle est la la légitimité de chacun à critiquer (dans le sens premier du terme) publiquement son environnement ? Mon sens du suicide professionnel restant à ce stade très limité, j’évite d’exposer sur ce blog tout ce que je ne dirais pas à une assemble de 500 personnes, c’est la règle que je me suis fixé.

J’ajouterais un deuxième niveau qui s’appuie sur une approche que je mets en pratique systématiquement : la démonstration par l’exemple. La théorie non illustrée perd selon moi toute sa force. Or un exemple digne de ce nom est précis, étayé de noms, lieux, date… Toute opinon basée sur des faits mettant en cause son entourage professionnel devient donc difficile à manier.

Suis-je condamné à aligner sur mon blog des faits positifs, donc des opinions fades et finalement sans grand intérêt ? Aiguiser un sens critique acceptable sur un blog, c’est là que se situe mon challenge du moment. J’y travaille mais cette rubrique sera dans un premier temps l’occasion d’effleurer tous les thèmes que j’aurais aimé approfondir sans pouvoir le faire faute d’exemples publiable selon mes critères.