Ma troisième web tv

Internet, c’est aussi tenir des rendez-vous que personne n’attend. Dans la catégorie, il y a ma vidéo annuelle de fin d’année.

En 2009, je débutais, en 2010, je conceptualisais, en 2011, j’innove. Avec un nouveau format (SocialCam), un invité (Thibaud), du public (en délire), des rebondissements, des scoops, un peu d’action, le tout en plan séquence et en quasi temps réel.

A l’année prochaine ?

Avant la technologie

En 2012, je m’apprête à fêter mes 20 ans. De travail.

En 1992, j’apprenais le métier que je fais encore (un peu) aujourd’hui. Avec un équipement et un rythme assez différent de ce qu’on connait aujourd’hui : j’ai connu la magie de la communication avant la technologie et Internet.

Mon quotidien était celui d’un assistant attaché de presse en agence. Ma mission préférée était de rédiger des communiqués et dossiers de presse. C’est donc avec mon plus beau stylo que je me lançais dans des envolées lyriques pour évoquer le débarquement des forces alliées en célébrant l’anniversaire des briquets Zippo ou donner des idées cadeaux issus des magasins Soho pour la Saint Valentin. Après relecture et validation par ma boss de la version papier, j’attaquais la retranscription sur un Mac dont l’écran de 13 cm affichait rarement d’autres couleurs que le vert à l’allumage. Je tapais à deux doigts, rythmé par le bruit du canard à chaque fausse manip. 30 minutes pour rédiger, 2 jours pour retranscrire, un bon petit rythme.

Après finalisation du document, j’étais en charge de son impression en 1000 exemplaires chez mes potes de Copy Top puis l’assemblage et la mise sous pli dans des enveloppes marquées d’adresses écrites à la main « pour créer de la proximité ». De toute façon, les coordonnées des journalistes étaient compilés dans de grands classeurs qui ne permettaient pas vraiment l’impression d’étiquettes. Un affranchissage et un détour pour la poste plus tard, ma prose n’avait finalement mis qu’une bonne semaine pour atteindre les rédactions. Le tout en respectant les délais de bouclage : pour la Saint Valentin, c’est en octobre que les informations partaient aux mensuels. La seule capacité à anticiper 4 mois à l’avance rappelle à quel point je parle d’un autre siècle…

Venait alors le temps des « relances journalistes ». Perdus sous des montagne de courrier qu’ils avaient arrêté d’ouvrir depuis longtemps, malgré les efforts que nous mettions à rendre nos dossiers attrayants même empilés sur un bureau, les journalistes accueillaient mes appels avec une humeur variable. Ce que je préférais, c’était les relances pour Vanity Fair, une marque de lingerie branchée qui m’entrainait dans des discussions surréalistes avec la presse féminine sur les avantages de telle ou telle texture pour un soutien-gorge. On passait des heures au téléphone. Moi qui répétais mon texte avant d’appeler pour prendre un rendez-vous chez le dentiste quand j’étais ado, je me retrouvais à appeler des inconnus avec le challenge d’obtenir une conversation plutôt qu’un monologue de marchand de tapis. A cette époque, une bonne cinquantaine de journalistes sont devenus des amis, ce qui m’a permis de nourrir le plus beau cliché de l’attaché de presse : « Ma chérie, ça va toi en ce moment ? Ca s’arrange avec Patrick ? Faut ABSOLUMENT qu’on dej… Et sinon, tu travailles sur quoi en ce moment ? Parce que j’avais pensé pour ta fameuse page rouge annuelle à un sublime stylo plume carmin que tu vas ADORER, je te l’envoie par coursier dans les 2 jours. Bien sûr je t’écrirai la légende qui va avec ma chérie, je sais que tu as beaucoup de travail« .

OK, j’en rajoute mais c’était de cet ordre là. Quand je faisais bien mon travail, plein de retombées presse arrivaient de l’Argus de la presse, découpées à la machette dans de grandes enveloppes cartonnées. Je devais alors tout redécouper, souvent aller acheter l’original en kiosque pour récupérer un bout de l’article oublié et coller dans de grands classeurs sur du papier Canson noir jet.

L’absence de mail créait un rythme différent en particulier en cas de traduction : nous recevions par la poste une disquette qu’il fallait envoyer chez un traducteur choisi plutôt à Paris pour gagner un peu de temps. Lors des salons et l’émulation qui va avec, nous recevions en quasi temps réel les drafts par fax, pas le temps d’attendre la poste pendant 24 heures, les versions françaises étaient alors travaillées sur place par un traducteur qui venait s’installer dans l’agence quelques jours.

Les 3 premières années de ma vie professionnelle se sont donc écoulées sans que j’ai vraiment l’opportunité (ni le besoin) d’apprendre à taper sur un clavier avec plus de 2 doigts, le téléphone collé aux oreilles du matin au soir. Etonnamment, je ne me souviens pas de la première fois que j’ai utilisé Internet et les emails dans mon travail et j’ai mis du temps avant d’en mesurer le bouleversement dans mon quotidien. Je regrette parfois son charme désuet, j’avoue.

Révélation

Depuis quelques semaines, j’enchaîne les voyages en avion. Ma consommation de lexomil a donc augmenté proportionnellement, les comprimés sécables s’étant imposés dans la gestion approximative de ma phobie croissante des aéroports, du décollage, des turbulences, des tenues bariolées des hôtesses (dans le désordre).

Sur le chemin de Pékin depuis Chengdu, j’ai eu la chance de voyager à côté d’un PNC chinois qui a su capter la nervosité que je croyais pourtant dissimuler mieux que personne en public. Je pense que c’est au moment où un téléphone s’est mis à sonner en plein décollage que la panique a pu se lire distinctement, en particulier au travers de ma recherche active d’un comprimé supplémentaire. Mon voisin s’est penché vers moi pour m’expliquer dans un anglais aussi parfait qu’apaisant « est-ce que vous pensez vraiment que si le moindre appareil électronique pouvait perturber le fonctionnement d’un avion, on laisserait les passagers à portée de leur téléphone après les avoir dépouillés de la moindre allumette avant de mettre un pied dans l’avion ? ».

Je ne saurai jamais si c’est grâce à la double ration de lexomil ou à l’implacable logique de la révélation que je me suis senti immédiatement rassuré. J’ai dormi pendant les 2 heures de vol pour fêter ça.

Je suis convaincu par l’expérience et je demande un membre du personnel navigant à proximité pour l’intégralité de mes prochains voyages en avion. Il doit bien y avoir une compagnie dans le monde qui propose ça, non ?

My first livetwitt

Vous vous souvenez de Koh Lanta Palawan en 2007 ? Moi oui, parfaitement. Cette année là, tous les vendredis soirs d’été, c’est en anglais que, pour la première fois, je m’amusais en temps réel des mésaventures de Robinsons Crusoë franchouillards qui entertainaient mes rares followers sur Twitter. Constitués pour la plupart d’américains, ils m’ont laissé en héritage le nom de ce que j’étais en train de faire sans le savoir : un LIVETWITT. #LT pour les intimes.

Nous étions tellement peu nombreux à parler français en 2007 sur Twitter que la grande majorité de nos twitts était en anglais, même dans nos conversations très locales. Phénomène pas très éloigné de ce qu’on a connu récemment sur Google +.

Assez naturellement, l’envie d’échanger sur l’une des rares émissions que je regardais pour le plaisir depuis longtemps est arrivée. Il a donc fallu le faire en prenant en compte un public qui ne pouvait pas partager le programme. Le hashtag choisi était donc #Survivor (nom de l’original américain), chaque twitt était descriptif de la situation, « feux de camp », « totem » et autres « carré final » avaient leurs traductions trouvées avec l’aide des américains et le volume était mesuré pour ne pas saturer les timelines de contacts, souvent collègues, qui étaient en pleine heure de bureau. Et vous savez quoi ? On a bien ri !

C’est avec La Nouvelle Star, au début de l’année suivante, que le bascule en français est devenu possible, la masse critique étant atteinte. Le phénomène sociale de Confessions Intimes, qui réunissait depuis des années des gens dans des bars pour inventer des jeux à boire au rythme des fautes de français des protagonistes, a enfin pu se prolonger sur le web. Et la langue de mes followers a alors naturellement fortement penché vers le francophone, les anglophones se trouvant submergés de twitts sans intérêt pour eux, en français, lors de mes programmes préférés.

Et ce n’est qu’en 2011 que le livetwitt a semblé intégrer réellement la stratégie des chaines françaises et en 2012 que la Social TV est annoncée comme une réelle tendance. Soit 5 ans plus tard… Autant dire une éternité. Pourtant, je me souviens avoir beaucoup discuté avec plusieurs chaînes françaises en 2008 d’une nouvelle façon de prolonger le lien social en temps réel, rare valeur ajoutée que la télé était destinée à garder pour longtemps. Devant des décideurs qui me regardaient à peu près comme si je leur parlais de l’envahissement des extra-terrestres pour l’année suivante… Ils ont depuis rattrapé tant bien que mal leur retard même si un discours stratégique digne de ce nom tarde à venir.

Au fait, c’est Jade et Kevin qui ont gagné Koh Lanta en 2007. Gros retentissement dans ma petite communauté américaine de l’époque (ahah).