Bilan séries 2015

En 2015, je n’ai pas abordé les séries comme les 10 années qui ont précédé. Par manque de temps ou de disponibilité, j’ai décidé de choisir plus, d’abandonner plus vite des nouveautés décevantes, de me laisser conseiller plus par le bouche oreille.

A l’arrivée, forcément, mon classement manque de surprise, il est court mais particulièrement jubilatoire côté nouveautés. En plein dans l’air du temps : des mini-séries ne dépassant pas 12 épisodes, pas mal de surnaturel, des inspirations très visibles qui font plaisir, des atmosphères globalement pesantes, des surprises permanentes comme j’aime.

J’ai vu peu de nouveautés mais je les ai toutes aimées (à une demi réserve près).

Sense8

En contradiction totale avec ce qui précède et le temps qui m’a manqué, j’ai regardé 2 fois les 12 épisodes de Sense8. Entre les 2, il y a eu le documentaire sur le tournage « Sense8 : la création du monde » qui révèle des secrets de tournage suffisamment intrigants pour donner envie de revivre l’expérience avec un oeil nouveau. Je confirme mon impression en cours de route : la mise en place souffre d’un épisode de trop, seule critique que je trouve à une série qui m’a littéralement transporté et subjugué. Un coup de coeur qui place cette création dans le Top 5 de mes séries préférées de tous les temps.

M. Robot 

Je pense que j’ai été envouté sur ce coup là. Entrer pendant 10 épisodes dans la tête d’un personnage aussi instable qu’autiste constitue une expérience qui ne laisse pas indemne. Le twist est attendu, mais citer le film auquel il fait immédiatement penser en dirait trop sur l’histoire. Le personnage central, Elliott, est sans doute la plus belle création de cette dernière décennie et je n’ai pu m’empêcher de penser que, si j’avais été acteur, c’est lui que j’aurais aimé interpréter.

UnREAL

Je n’attendais rien de cette série. Le pitch sur les coulisses d’un reality show m’a intéressé et je me suis laissé séduire dès les 10 premières minutes. J’y ai reconnu ce que je sais des dessous de ces programmes et j’avais envie du guilty pleasure d’une série un peu facile, au moins en apparence. Au final, j’ai aimé au point que ça m’a motivé pour écrire un billet sur le Plus de l’Obs. C’est dire. J’ai un truc pour les anti-héroïnes, c’est évident.

Wayward Pines

C’est le retour du maître du twist : l’auteur du 6ème sens créé une mini série qui se cherche parfois, qui déçoit un peu mais qui a l’atout de marquer suffisamment les esprits pour y faire repenser souvent. Son inspiration « Le prisonnier » et sa façon de faire disparaître des personnages centraux n’y est sans doute pas étrangère. J’aurais aimé que ça reste un unitaire, pas sûr de regarder la saison 2 qui a finalement été confirmée. Pourtant, je n’ai pas réussi à classer Wayward Pines parmi les déceptions de l’année, j’aurais regretté de ne pas l’avoir vu.

The Leftovers

Je sais, ce n’est pas une nouveauté. Je n’avais pas particulièrement aimé la saison 1 et j’ai donc décidé de regarder (sous la pression de tous ceux qui parlaient de chef d’oeuvre) comme une nouvelle série. Aidé par le choix d’une nouvelle dynamique, de nouveaux personnages, un nouvel endroit. Au final, la saison 2 de The Leftovers est une pépite, un moment de grâce exigeant, douloureux, pessimiste. Une allégorie qui pose des questions pretextes auxquelles on n’attend pas de réponse, le créateur de Lost a réussi cet exploit. La réalisation au plus près des visages capte les regards d’acteurs habités. Si on considère que la saison 1 n’a pas existé, The Leftovers est la série qui entre tout simplement en tête du classement de mes séries favorites, devant Six Feet Under et Breaking Bad.

Il y a encore pas mal de série que je n’ai pas pris le temps de regarder. Celles que tout le monde semble aimer : Better Call Saul (trop peur de la déception d’après « Breaking Bad »), Jessica Jones, Daredevil, American Crime, Master of None, Limitless… Il y a aussi Quantico, The honorable woman, Vicious, Zoo, Blindpost que je ne prendrai probablement pas le temps de regarder alors que je sens un vrai potentiel.

Il y a aussi les séries que tout le monde aime et pas moi. Je pense en particulier à Empire que j’ai essayé 2 fois et qui m’a définitivement ennuyé.

Parmi les retours, je continue à ne pas lâcher Arrow en saison 4 et Scandal en saison 5. Et je mets une mention spéciale à How to get away with murder dont j’ai adoré la saison 2 alors que je m’attendais à une déception majeure.

Et enfin, le départ que je regrette cette année est celui de Downton Abbey dont je suis en train de déguster tranquillement la dernière saison jusqu’au final qui vient d’être diffusé à Noël.

Reconnecter ses émotions

Récemment, j’ai appris que le cerveau humain était suffisamment bien armé pour opérer une mise à distance lorsque la force des émotions dépasse sa propre capacité à les gérer sans causer des dommages. Un laps de temps plus ou moins long mais nécessaire , lorsque le choc change notre environnement durablement, jusqu’à atteindre un stade de délivrance. Ce sont aussi, plus simplement, ces moments qu’on a tous connus : l’impression de quitter son corps pour s’observer ne rien ressentir. Alors que les larmes devraient couler, la peur devrait nous envahir, le bonheur devrait prendre le dessus…

C’est donc une protection totalement inverse à la sous-pape de sécurité dont la nature nous a doté : on attend d’être prêt pour vivre, à retardement, des émotions trop intenses.

Je dois me rendre à l’évidence : j’ai dû par mégarde atteindre l’âge de la sagesse ultime puisque mon cerveau semble super prêt à vivre toutes les émotions sur le moment, sans décalage et sans protection. Ces 3 dernières semaines se sont chargées de m’en informer.

 

 

Le crash test fin 2015

Presque instinctivement, j’ai pris la décision de rentrer chez moi, inquiet à l’idée de me retrouver enfermé dans le restaurant où je me trouvais pour un rendez-vous professionnel. J’avais juste entendu parler d’explosions étranges au Stade de France et d’une fusillade dans Paris. Il était 21h30 ce 13 novembre et alors que j’approchais de chez moi,  l’ambiance devenait vraiment étrange : de plus en plus de sirènes, des pas de plus en plus rapides autour de moi, j’ai senti monter ce sentiment irrationnel puisqu’il ne reposait alors presque sur rien. Et pourtant, ce battement de coeur qui s’accélère, cette attention décuplée au monde bizarre qui m’entourait, je les reconnaissais. Ce que j’ai ressenti, c’était bien de la peur.

Ce n’est pas l’envie qui m’en manquait, dans la nuit qui a suivi. Mais je ne pouvais décemment pas laisser couler les larmes, alors que j’étais entouré de ceux qui avaient vécu la terreur de beaucoup plus près que moi. Recueillir pour une nuit ceux qui s’étaient retrouvés dans ma rue, à proximité du Bataclan, à la recherche d’un refuge que j’avais signalé comme beaucoup sur Twitter #PorteOuverte avait un prix que je n’avais pas anticipé. Après avoir vérifié que mes proches étaient tous à sain et sauf, il ne me restait plus qu’à retenir mes larmes. Ce n’est que le lendemain matin que j’ai pu enfin pleurer devant ma télé. Et laisser aller toute ma tristesse.

Cette journée là, j’ai ressenti pour la première fois depuis vraiment très très longtemps  un sentiment que j’avais oublié. Que j’ai caché en déclarant mon amour à ceux que j’aime mais qui ne le savent pas toujours. En me disant que ces moments de douleur partagée avait au moins la vertu d’effacer une retenue qui ne sert à rien. Sans jamais être vraiment dupe. Ce sentiment ne ressemblait pas à du partage. J’ai pourtant eu la chance de passer cet après-midi là avec un ami qui est venu se prostrer avec moi devant les images en boucle des chaînes d’info continue, puis la soirée très entouré avec quelques-uns de mes très bons amis. Et pourtant, c’était incontrôlable et abyssal. Cette envie de sentir une tête sur mon épaule, des bras dans lesquels me blottir. C’était terrifiant. C’était tout simplement un extrême solitude.

Je crois dans les 3 semaines qui se sont écoulées avoir vécu en temps réel les 5 premières étapes émotionnelles du deuil telles que Elizabeth Kübler-Ross les a décrites : le déni, la douleur de l’ordre de la culpabilité, la colère, le marchandage, la douleur en attendant la reconstruction et l’acceptation. Le tout percuté par des moments de fierté (plutôt professionnels), de fatigue extrême (infligée par des nuits trop courtes), de bonheur d’être autant entouré, d’exaspération un soir d’élection. Un tourbillon que j’espère pouvoir continuer à gérer.

Moi qui m’inquiétais de ne pleurer que devant un mélo efficace au cinéma, je peux être rassuré. La mise à distance émotionnelle ne me concerne plus. Je ne suis pas complètement sûr à ce stade que ce soit une bonne nouvelle.