Mon histoire professionnelle avec la musique

Mon rendez-vous professionnel avec le monde de la musique aura été tout aussi précoce qu’éphémère. Un peu douloureux, moins léger que prévu et terriblement formateur. Pas que professionnellement, justement. Je ne m’en suis souvenu que très récemment.

Note février 2021 : 20 ans plus tard, j’ai finalement retravaillé pour une maison de disque mais en tant que consultant… et 20 ans de plus.

En 1991, j’entame en même temps qu’une licence de Biochimie une école de communication choisie pour son accès au stage. Je veux travailler alors que la solitude face aux paillasses qui accueillent les décérébrages de grenouilles à la chaîne me pèse. Après que le service des stages de l’EFAP m’ait placé tous les après-midi dans l’Association des Paralysés de France pendant 3 mois pour répondre à mon envie première (me rendre UTILE), j’ai besoin de légèreté à un moment où 10 mois de vie militarisée se profilent. Je décide donc de suivre un ami dans une aventure qui m’amuse alors qu’il y joue depuis quelques semaines déjà son envie professionnelle à peu près comme si sa vie en dépendait. Ma formation musicale et les écouteurs de mon waklman Sony scotchés à mes oreilles 24/7 ne m’ont pour autant jamais donné cette envie là. Il s’agit plus d’éprouver la capacité des stages à tester des univers différents et de s’exposer à la possibilité de surprises inattendues que de réaliser un rêve. Tellement ont ça dans le sang, ça me rend quelque peu exotique. J’aime l’idée. Je vais forcément m’amuser. Quoiqu’il arrive.

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En janvier 1992, j’entame donc 6 mois de stage chez Delabel, filiale de Virgin France créée 2 ans plus tôt par Emmanuel de Burtel. J’ai de la chance. Au catalogue, se trouvent quelques artistes que j’aime vraiment (Les Negresses Vertes, les Rita Misouko…) et un groupe qui monte (I am). Lorsque je mets les pieds pour la première fois dans le grand loft qui sert de bureau, je sens une ambiance électrique. Mon pote Pierre est en train de finaliser le texte d’un artiste qui vient d’être signé. Il a une couleur rouge violacée qui m’oblige à vérifier que ce n’est pas l’éclairage de la pièce qui est défectueux. La numéro 2 de la maison de disque dont on m’a déjà signifié les crises d’hystérie plus ou moins passagères vient de l’humilier publiquement en lui balançant son texte à la gueule. Ca tombe bien, c’est elle justement qui doit m’expliquer mon job dans 10 minutes. Avec probablement l’étiquette du « coopté par son pote incompétent » scotchée sur le front.

Par je ne sais quel délire de mes neurones pourtant supposés être au pic de leur forme à 22 ans, j’ai mis l’un de mes Jean’s les plus troués pour mon premier jour de travail. C’est Christophe, en charge de la programmation clubbing, qui m’accueille avec un grand « tiens voilà la chair fraîche pour mes soirées, il a déjà compris ce qui m’excitait au niveau des fringues, c’est un bon début« . C’est la première fois de ma vie que je me fais ouvertement brancher par un mec. Je suis d’emblée mort de honte. Personne n’ayant eu la bonne idée de me prendre en photo à ce moment là, je ne peux que m’imaginer victime de la couleur de peau contagieuse de mon pote Pierre. Christophe fait partie de ces gays qui portent leur orientation sexuelle comme un étendard, sans doute pour éviter les chuchotements et LE moment où il faut avoir cette discussion qui consiste à « révéler » le secret si mal gardé. Je le déteste immédiatement pour son absence évidente de bienveillance. Mais je n’aurai qu’à ignorer ses remarques lourdes… et adopter pour la première fois de ma vie une tenue de banquier (toute proportion gardée), bordel !

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A peine le temps de retrouver mon plus beau teint de jeune homme que Marie-Jeanne, la responsable promo qui coiffe donc toute l’équipe et gère la presse écrite, m’accueille. Elle parle vite, de façon saccadée, ses ongles sont rongés. De son bureau, on aperçoit celui du big boss. A peine le temps d’y discerner des personnes qui parlent à mots couverts, des cassettes empilées et une énergie qui me parait a priori créatrice et attractive, que Marie-Jeanne me tire déjà par le bras dans la direction opposée.

« Bon, ton travail est très simple. Je te montre. Nos communiqués sont tous imprimés en encre blanche sur du papier marron corporate. C’est l’identité de la boite, tu comprends. C’est TRES important. Le stagiaire précédent faisait n’importe quoi, il faut vraiment que tu sois minutieux, le papier se coince souvent dans la photocopieuse, il a de la main, tu comprends. Et il absorbe l’encre si on ne met pas le papier dans le bon sens. C’est HORRIBLE. Et comme tu en imprimeras plusieurs centaines par jour, tu laisseras passer des unités qui ne sont pas parfaites. C’est INACCEPTABLE. Tu gâches tout notre travail si tu laisses passer ça, tu comprends ? Tu arrives bien à 14h précises tous les jours et tu restes jusqu’à ce que tout sois bien imprimé, mis sous pli et apporté à la Poste. Ce sera toi aussi. Mounia te montrera où est la Poste. C’est à 17 heures mais tu reviens ensuite parce qu’il faut avancer le travail du lendemain. Parce que ton prédécesseur hein… enfin bref. »

Elle ouvre des bacs dans tous les sens pendant qu’elle me parle de la machine qu’elle n’a de toute évidence jamais utilisée. Je la regarde hagard, seul mon bloc note me donne une sorte de constance, j’y ai noté des mots que j’ai toujours chez moi, 20 ans plus tard : « Marie-Jeanne – 3 janvier 1992 – imprimer les CP marron sur blanc. Attention au sens du papier. La main ? Imprimer plusieurs centaines. Horrible. Poste à 17h (Mounia). Tu comprends ?« .

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Sur le chemin qui me dirige vers mon bureau, je croise une bombe atomique sautillante qui porte une mini jupe qui permet de connaître au premier mouvement la couleur de son string. Je lui dis bonjour, elle ne me regarde même pas, préférant aller se marrer avec son pote Christophe qui, lui, me regarde bien. Je pose enfin ma veste et mon sac sur mon bureau, juste en face de Pierre qui continue à galérer. J’essaie de détendre.

– Dis donc, elle a l’air sympa Sophie Marceau version ultra court
– Emmanuelle ? Mouais, elle s’occupe de la promo radio télé en couchant avec tous les programmateurs de la place de Paris, ça marche super bien. Elle sait pas aligner 2 mots grammaticalement corrects mais c’est pas trop trop ce qu’on lui demande. Si tu l’ignores, ça se passera bien. Comme avec Christophe en fait, mais ce sera plus dur.

Je jette un oeil sur son texte. Ca parle de chanteur nigérian repéré dans le métro par le directeur artistique. De façon plus brillante que je ne saurais jamais le faire. Un peu littéraire à mon goût pour un communiqué de presse sensé être froidement informatif, mais définitivement inspiré.

– Je dois finir ce putain de texte dans 5 minutes : l’artiste est dans le bureau du patron qui VEUT un texte maintenant. J’ai eu le temps d’écouter un titre seulement, c’est pas trop ma came. Tiens écoute.

Les sonorités funk me plaisent immédiatement. Ca parle du rythme de l’amour. C’est une bombe, je le sais immédiatement. Je décris à Pierre ce que j’ai ressenti en l’écoutant, il griffonne 3 phrases qui bouclent son texte et fonce dans le bureau de Marie-Jeanne « pour validation ». Trente secondes plus tard, je vois Marie-Jeanne foncer dans l’inaccessible bureau du patron pour expliquer qu’elle est désolée de présenter dans un format brouillon ce texte qu’elle vient de dicter en quelques minutes. Bon esprit. Tout le monde semble ravi, Pierre gère comme il peut son mélange de fierté et de frustration, il me remercie du coup de main.

– Au fait, il s’appelle comment, l’artiste ?
Keziah Jones, l’album c’est Bluefunk is a fact, le lead qu’on a écouté, Rythm is love.

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Mes après-midi de photocopieuse se déroulent sans encombre majeure. J’ai décidé de ne même pas essayer de faire reconnaître le moindre talent -que je ne pense de toute façon pas avoir. Inutile de risquer de provoquer l’exploitation abusive, sur le modèle de celle que subit quotidiennement Pierre. Il accepte de n’échapper à aucune humiliation d’une Marie-Jeanne qui le déteste probablement pour cette capacité d’écriture qu’elle n’a pas, ça me dépasse. Chacun a droit à son moment dégradant, sauf moi, protégé par ma non-mission que j’exécute avec brio, c’est à dire sans ronchonner. Mounia est devenue mon amie qui m’accompagne pour le plaisir à la poste tous les jours. La gestion du bourrage papier est l’aventure la plus extrême qui m’arrive pendant mes heures de bureau mais je dévore chacun des textes de Pierre avec plaisir et profite de l’écoute des albums avant même leur sortie avec délectation. J’échappe par bonheur le matin, alors que je suis en cours, aux descriptions détaillées des soirées plus ou moins décadentes de l’équipe auxquelles nous ne sommes bien évidemment pas invités, nous, les stagiaires.

Je n’ai toujours pas échangé un seul mot avec Emmanuelle, Christophe continue inlassablement son rentre dedans très direct, plus pour le jeu que pour le principe en lui-même à ce stade. J’ai fini par le trouver drôle même lorsqu’il m’explique qu’il attend avec impatience le prochain stagiaire qu’il espère plus coopératif. Pierre continue à me poser des questions pour inspirer ses textes et ça me plaît. Marie-Jeanne essaie mais ne sait visiblement pas quoi me dire quand elle se retrouve plantée devant moi au gré de ses va et viens incessants dans les bureaux pour des raisons que personne ne comprend. Je n’ai toujours pas vu à moins de 5 mètres Emmanuel de Burtel que je trouve donc peu sympathique mais brillant, de principe.

Un jour je croise Helno des Negresses verte, le lendemain Catherine Ringer et Fred Chichin, tous plus adorables, attentionnés et prévenants que l’équipe qui est censée me coacher. Je comprends vite que je n’aimerais pas vivre dans leur univers mais l’observer en spectateur me plait et m’enrichit. Les marseillais d’I Am sont à Marseille. Kéziah est là tous les jours et me raconte le rêve éveillé qu’il vit, son titre commençant à cartonner sérieusement, et pas qu’en France.

Entre deux sessions de photocopieuse, je m’ennuie, donc je me lance dans la conception d’un système de classement des titres selon un référencement qui me parait utile pour les télés, la radio, la presse écrite et les boîtes de nuit. J’ai remarqué que l’archivage déplorable de l’ensemble des titres au catalogue génère une perte de temps pour tous. C’est 2 mois après mon arrivée que je fais passer le résultat à Marie-Jeanne puis Emmanuelle et Christophe. Marie-Jeanne ne m’en parle pas. Emmanuelle me dit bonsoir pour la première fois. Christophe vient me remercier avant d’ajouter immédiatement appuyé par un clin d’oeil décontractant qu’on devrait aller fêter ça lui et moi dans son appartement. J’en ai gagné 2 sur 3, je me sens à quelques millimètres du strike.

Pierre continue à vivre sa part de rêve dans la douleur, lui seul ne s’aperçoit pas que c’est en fait un cauchemar éveillé. Pendant qu’il souffre tous les soirs sur des textes qui ne conviennent jamais, je profite avec de moins en moins de scrupule des places de concerts qu’Emmanuelle et Christophe me distribuent comme des bons points à chaque fois que je leur rends des services. J’ai toujours l’impression de ne pas servir à grand chose mais j’ai trouvé un équilibre qui me va plutôt bien.

Le 30 juin 1992 est mon dernier jour. Pierre a signé pour 1 an, j’ai signé pour d’autres trous de combat. Marie-Jeanne me convoque dans son bureau sans que je ne m’y attende vraiment. Si elle me parle de la qualité de mes photocopies, je me sens prêt à improviser une suite d’insultes comme on lui en a rarement servi. Elle me remercie en fait pour mon intégration « dans une équipe difficile » et pour ce que j’ai apporté « par mes nombreuses initiatives ». Elle est émue. EMUE. Vraiment. Je n’en crois pas mes yeux. Ce qui m’interdit toute malhonnêteté intellectuelle. Je lui explique que j’ai énormément appris sur les gens, sur ma capacité à rester à ma place, sur un monde dans lequel je ne voudrais travailler pour rien au monde, sur ce que je ne ferais jamais dans l’hypothèse peu probable où je deviendrais un jour patron d’une équipe comme Emmanuel et elle. Autant d’enseignements que je me suis avoué pour la première fois, un peu pris au dépourvu, dans son bureau.

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Dans les mois qui ont suivi, alors que la caserne m’apprenait d’autres choses pas moins utiles loin de là, j’ai eu l’occasion de repenser à Delabel à plusieurs reprises, notamment grâce à Pierre qui continuait à y évoluer. L’annonce du décès par overdose d’Helno, le succès exceptionnel du premier album de Kéziah, le départ successif et plus ou moins volontaire de Marie-Jeanne, suivi de Christophe et Emmanuelle…

Pierre est depuis devenu auteur, il a écrit un bouquin sur l’idole qu’on partageait, Marie Laforêt, puis Etienne Daho. Il continue à publier régulièrement et exerce parallèlement son métier de journaliste lorsqu’il ne s’écrit pas un album. Je suis tombé hier sur un bouquin qu’il a co-écrit. Emmanuel de Burtel a évolué au gré du rachat de Virgin par EMI et du rapprochement avorté avec Time Warner en 2000. Jusqu’en 2004, année à partir de laquelle il poursuit une voie plus indépendante mais toujours aussi influente dans le monde de la musique.

Je ne l’ai jamais rencontré, Emmanuel, je me demande à quoi il ressemble en vrai.

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L’Ecole de Chiens Guides pour Aveugles de Paris

Demander à ses amis de mettre en lumière une cause qui lui tient à coeur en guise de cadeau d’anniversaire est une belle idée. Très franchement, je n’ai jusqu’ici, pour des raisons personnelles ou professionnelles, jamais eu à m’intéresser aux chiens guides pour aveugles et malvoyants. William nous a donc emmené à la découvertes de l’Ecole de Chiens Guides pour Aveugles et Malvoyants de Paris et de la Région Parisienne.

Au programme, un exercice les yeux bandés avec un chien (incroyablement patient), une rencontre avec 3 personnes déficientes visuelles et leur guide respectif, une visite des chiots en élevage qui nous ont évidemment totalement fait fondre. Et des tonnes d’informations.

Pour la partie exercice, c’était évidemment plus sensoriel qu’éducatif mais une belle expérience. J’en retiendrai cette photo qui montre assez bien que si le côté presque ludique l’a emporté chez nous, il y en a un qui a travaillé tout le temps, aux aguets, ici les yeux rivés sur l’objectif : c’est le chien.

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Nous avons ensuite rencontré 3 vraies natures, même si les personnalités sont assez différentes, qui nous ont raconté et donné à voir leur relation avec leur chien, leur quotidien, la valeur de ce guide qui est devenu leurs yeux. Touchant mais souvent drôle aussi.

Le moment « on fond tous devant un chien » est arrivé avec la visite de l’élevage et en particulier la portée de Retriever absolument craquants.

Ce que j’ai retenu de cette visite :

– Les étapes d’éducation et de suivi d’un chien guide sont l’élevage, la famille d’accueil, l’éducation, le stage d’adaptation du chien avec la personne, des journées de perfectionnement et l’après-guidage (la retraite) après 10 ans.

. S’il faut compter 15.000 Euros pour élever un chien guide, il est gratuit pour un aveugle ou un mal voyant

. Il y a beaucoup de façons possibles d’aider une école association loi 1901 telle que celle que nous avons visité à Vincennes : faire un don ou leg, acheter à la boutique, devenir famille d’accueil, d’élevage ou de retraite, faire du bénévolat… Une entreprise peut parrainer l’association, y exercer du mécénat ou un accord d’entreprise. A ce jour, l’école est soutenue par les entreprises privées suivantes : Alain Afflelou, La RATP (Fondation), Crédit Agricole, Sanofi Aventis en plus de Royal Canin.

Merci William pour ce moment utile, partagé avec Mathilde, Anne-Laure et Benjamin, Greg, Cyril et Todac. A ceux qui ont raté le rendez-vous, bonne nouvelle : la journée Portes Ouvertes de l’école est fixée au 26 septembre 2010.

Les héros du cinéma

J’avais raconté ailleurs cette soirée surréaliste de remise de prix au gratin du cinéma le mois dernier. Tous les ingrédients étaient réunis pour laisser croire que j’en rajoutais deux tonnes. Oui mais voilà, j’avais gardé les images par devers moi.

En appuyant sur le bouton play, il ne fera plus aucun doute que c’est plus par souci de dignité que par goût du secret : je suis donc infoutu de monter une vidéo proprement, c’est dit. En même temps, je trouve dommage de ne garder que pour moi cette captation sur le vif uniquement pour cacher une agilité technique proche du ridicule qui aboutit à un film dans un format illisible, sans titre ni transition dignes de ce nom. Et puis les commentaires sont intégrés en voix off des Heckel et Jeckel derrière la caméra que je laisse soin à votre perspicacité de reconnaître.

La virtualité de la non amitié…

Ce week-end passé en famille a généré quelques discussions animées sur un sujet dont je n’ai vraiment mesuré la complexité que depuis quelques mois. Un des sujets pourtant le plus important de la vie que j’ai choisie. Il y est question d’amitié et des preuves qui vont avec. Et de l’impact des réseaux sociaux sur mon cercle rapproché.

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D’un côté, il y a mes « amis de toujours », ceux avec lesquels j’ai tissé des liens forts sur le mode d’avant pour composer avec la distance : quelques coups de téléphone, quelques emails et une visite à chaque occasion. On se tient au courant de loin en loin mais on ne sait finalement pas grand chose de nos vies respectives.

De l’autre, mes « amis d’aujourd’hui » rencontrés de près ou de loin via les réseaux sociaux. Forcément très proches, en contact permanent par une voie ou par une autre (email, blog, Facebook, Twitter et soirées, week-end, vacances…). On se suit au quotidien, on sait presque tout les uns des autres.

Entre les deux, une catégorie s’est modelée avec le temps. Je ne suis pas sûr de savoir quoi en faire. Ce ne sont pas des amis. Et pourtant, je sais beaucoup plus d’eux que la plupart de mes « amis de toujours ». Et même je leur dis beaucoup plus qu’à quelques-uns de mes « amis d’aujourd’hui ». Certains savent tout de moi, sans doute parce que la dimension virtuelle rend les choses plus simples, n’engage à rien. C’est parfois vers eux que je me tourne pour demander un conseil qu’ils me donnent avec plaisir et je sais qu’ils en attendent autant de moi. Souvent initiées sur Twitter, régulièrement prolongées sur Gtalk, ces non-rencontres créent une relation bizarre, géographiquement proche ou très éloignée, dont je pourrais difficilement me passer.

En soi, rien de très grave, si ce n’est que maintenir en vie une amitié revêt une bonne dose d’énergie de plus en plus souvent aspirée par ces « nons amis ». Je ne sais pas comment ça évoluera dans le temps mais cette réalité là s’est accélérée depuis 1 an. Clairement. Sûrement un peu de mon fait mais pas que. Ca me fait penser que je me suis promis en 2009 de dire plus souvent aux gens que j’aime que je les aime. Je crois qu’il faut que je n’oublie pas cette promesse que je me suis faite.

Je me lève et je me bouscule

Avant, le matin, c’était simple : j’assumais mon statut de gros dormeur qui s’ignore en repoussant 5 fois la sonnerie du réveil avant de déguster péniblement mes Choco Pops au sucre roux dans du lait entier devant Bruce Toussaint et son équipe de la Matinale. 7 minutes à la salle de bain et un enfilage de vêtement plus tard, je prolongeais ma nuit dans le métro qui me larguait à 2 minutes de mon bureau sur les coups de 8 heures.

Trois ans après, tout a changé. A part la sonnerie du réveil toujours aussi élastique j’entends.

connecte

A 7h00, c’est une random radio d’info qui me sort du lit (je passe de France Info à Europe 1 en m’arrêtant aussi souvent que possible sur France Inter) direction allumage du PC. Alors que mes Special K croustillent d’excitation depuis l’arrivée du lait totalement écrémé absolument pas dénaturé par quelque ajout de sucre que ce soit, un long ballet commence.

Le tour de Twitter ne me prend pas plus de 15 minutes, je vais y chercher le pouls du monde (selon William) et de ma timeline (selon mon âme de concierge planquée tout au fond à gauche de ma zone la plus reptilienne). Les jours de fête, je trouve un truc drôle à dire, le plus souvent, je me contente de pleurer dedans en rêvant juste de retourner me coucher.

Une ouverture de gmail plus tard, je réponds aux urgences (mon abonnement GQ US arrive à expiration toussa) et découvre les réponses apportées pendant la nuit aux questions existentielles posées sur Formspring.  J’en profite pour répondre aux miennes (oui j’aime le MAUVE, non je n’ai jamais cuisiné par temps de pluie sous un saule pleureur orange, toussa).

Il est 8h30. Juste le temps d’activer Google Buzz pour vérifier que ça bouge toujours aussi peu… et trouver 4 occasions de nourrir un buzz proche de l’extinction définitive, par pure posture judéo-chrétienne.

Sous la douche, j’oublie tout, sauf de zapper de Canteloup sur Europe à Guillon sur Inter, puisqu’il est 9 heures. Je suis terriblement à la bourre. Je m’habille en 12 secondes, cours jusqu’au métro histoire de checker tranquille mes mails du bureau sur le trajet. Je vais enfin pouvoir allumer mon ordinateur au bureau et débuter ma journée.

Sinon, on comprend mieux pourquoi je refuse de tester chatroulette, non ?

L’insoutenable légèreté du quadra

Internet a bouleversé ma vie, bla, bla, bla. Parmi tous les effets collatéraux de la vie en réseaux sociaux, il y a la middle life crisis de nouvelle génération. Avant, on parlait du démon de midi. Le nanti qui partait voir ailleurs, jusqu’à mettre en danger la jolie vie de famille qu’il avait mis tant d’années à construire. Mais la Génération Y est passée par là et la vraie Digital Native Génération se profile déjà.

Je ne me sens pas de ma génération de « jeune quadra ». A vrai dire, je ne me sens plus d’aucune génération, et surtout pas de celles de mon âge et plus. Internet constitue l’un des rouages les plus actifs du processus et en montre quelques évidences. Le risque de basculer du côté pathétique du jeunisme n’est jamais très loin, je le sais et reste sur mes gardes. Mais j’ai pour moi une certaine cohérence, le net n’est pas la cause de tous les maux. Moi seul le sais. Tout petit déjà…

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Darty mon amour

Edit 21/01 : l’objectif n’étant pas d’attaquer des gens mais de regretter un système, j’ai supprimé les noms et viré un mauvais trait d’humour déplacé

Toute personne connectée avec moi sur Facebook, Twitter, par email, sur gtalk et même dans la vraie vie ne peut totalement ignorer que je fais des travaux chez moi. J’ai donc fatalement tous les problèmes de riche qui vont avec. Tiens là, par exemple, j’essaie de faire entrer une machine à laver dans les nouveaux plans de mon appartement. C’est évidemment une grave erreur, quand on est vraiment moderne, on achète la machine et on construit l’appartement autour. J’ai du mal m’y prendre à un moment. Depuis, je plante des aiguilles dans le logo d’un magasin dont je tairai le nom.

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Dessine moi un mouton (bordel)

Quand j’étais gamin, c’était le drame. J’étais le plus mauvais dessinateur que tout prof d’EMT normalement constitué avait rencontré de toute sa carrière, toujours. Représenter une maison, reconnaissable je veux dire, était un exploit digne d’une miss France qui resterait habillée sur des photos toute sa carrière. Les animaux étaient hors d’atteinte, sans parler des personnages humains qui ne l’étaient que pour moi, humains.

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Du coup, les jolis dessins de famille unie qui gambade devant la maison entourée de chats et de chiens ne sont jamais passés par mes feuilles blanches. Les fêtes des mères ont vu défiler des pliages ésotériques, des poèmes qui vieillissent mal, des cendriers en terre glaise, des enregistrement de chansons sur cassette mais des dessins, jamais. Pas par moi en tout cas, ma soeur ayant largement occupé le terrain avec un talent si fulgurant qu’il me m’éloignait chaque année davantage de la reconnaissance publique en la matière. Mais j’avais un autre talent.

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Geek relatif (le jour d’après)

En famille, aussi étrange que ça puisse paraître, je suis le type branché auquel on demande conseil dès qu’il s’agit de choisir un appareil moderne. Electronique ou électroménager, mobile ou de salon, peu importe, l’expert, c’est moi ! Ca me vient sans doute de mon passé : Kodak, Thomson, Loewe, Sony, plein de boites Hi Tech, pendant plusieurs années, ça laisse forcément des traces. Et tant pis  si c’était il y a longtemps : dans tout ce qui est techno compliquée, je suis le plus fort de tout l’ouest (de Besançon), sans concurrence possible. Soyons honnêtes, mon goût pour la nouveauté à fort potentiel grand public y contribue. Les premiers graveurs de CD, hard disk drive et écrans plats ont déboulé chez moi à des prix raisonnables grâce à mon travail qui m’offrait des occasions de tester facilement. Il faudrait que trouve le courage d’avouer que je suis en réalité une buse comparé à mes petits camarades du oueb. Je ferai ça en 2010 tiens.

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La fois où j’ai débranché

Lorsque j’ai commencé à devenir un contributeur actif sur Internet, je me suis posé pas mal de questions mais n’ai jamais douté de ma capacité à ne livrer que ce que je souhaitais délibérément partager. Ce ne serait pas un problème : plutôt secret de nature, l’enjeu serait davantage de donner suffisamment que trop. Accepter de lâcher prise, contrôler moins, tenter d’oublier que le terrain de jeu est public.

Cette année, j’ai eu l’impression plusieurs fois d’être sur un fil. En 2009, j’ai donc tenté de limiter le lâcher prise, reprendre le contrôle, penser plus souvent à ceux qui me lisent, ne pas oublier que tout ce qui est écrit reste, pour toujours. J’ai fait ça avec les moyens du bord.

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