Comme tous les gens de ma génération qui ont connu l’arrivée de l’épidémie, ont toujours associé danger à sexualité, ont perdu des amis ou des membres de leurs familles, ont mesuré la honte qui s’abattait sur les nouveaux contaminés, je ne m’habitue pas au décalage entre la perception des plus jeunes et la réalité de cette terrible maladie qu’est le sida. Il m’arrive d’en entendre parler comme on le ferait d’une mauvaise grippe, d’une simple contrariété liée à la prise de médicaments ou d’un risque exotique dont il faut se méfier si on voyage en Afrique. C’est insupportable et pourtant, il faut parfois s’obliger à ne pas s’y habituer. Que dire alors des médecins engagés dans le combat depuis lontemps, tous les jours confrontés à des horreurs dont on ne parle même plus, qui doivent continuer à se battre, à éduquer, convaincre et soutenir les malades ?
Un médecin face à la banalisation, c’est très exactement le témoignage que propose le Dr Marina Karmochkine, médecin à Paris et spécialisée depuis 20 ans dans la prise en charge médicale et l’accompagnement des personnes infectées par le VIH. Dans son livre paru aujourd’hui Saurai-je parler du sida ? aux éditions First, elle lie histoires humaines, avancées scientifiques et informations pratiques sur la prévention et la maladie. Et surtout, elle rappelle à ceux qui l’ont oublié un peu vite que le Sida tue encore, là, tout près de nous. Elle nous propose un document à se procurer d’urgence.